Editorial : Le temps des mobilités

« L’art de vivre et l’art de produire sont en train de se déconnecter »
(Jean VIARD, « Le réenchantement du territoire ». 2021).

Derrière l’apparente immobilité qu’aurait imposer la Pandémie, nous avons été de ceux qui ont voulu voir de nouvelles transformations en œuvre, tant du travail et de son organisation que des compétences et de leur management. Nos initiatives de 2020 en ont témoigné, au travers de de nombreuses « Conversations professionnelles » à distance et d’une belle Université de printemps « hybride », comme d’ailleurs les constats tirés des pratiques professionnelles de membres de l’Association et/ou de la participation de plusieurs d’entre eux à des travaux allant dans le même sens (au sein d’AFNOR, de l’AFREF ou de FRANCE STRATEGIE, …).

En fait, c’est à une véritable accélération du temps, des lieux du travail (1) et des modifications de comportements des collaborateurs (2) que nous assistons et que nous voulons prendre en compte pour être utile aux entreprises, aux manageurs et aux partenaires sociaux qui s’en soucient.

En posant l’équation de la conciliation dans nos travaux d’une « actualité » à traiter et des « orientations stratégiques » à porter, nous sommes tombés sur la nécessité de traiter les questions de « mobilités », sous l’essentiel des angles qui comptent, à la foi pour la société, les entreprises et celles et ceux qui en accompagnent les transformations.

C’est en effet le point commun de ce que nous avons déjà entamé en traitant des « reconversions et transitions professionnelles » avec les réseaux TRANSCO, CEP (notamment avec nos ami(e)s des CIBC) ou les Groupements d’Employeurs … comme en soulevant la question de la « reconnaissance des acquis de l’expérience » et de ses modalités à actualiser avec nos ami(e)s des APP ou des partenaires sociaux particulièrement engagés dans la prise en compte des nouvelles réalités apparues, notamment de façons transverses et mutualisables.

Mais l’accélération évoquée, c’est aussi celle des distances, avec le numérique dont l’impact s’accroît et le télétravail qui s’installe durablement, et par là des modes de vie : à l’instar du temps, « l’espace fond comme le sable coule entre les doigts » (3).

Et, dans ce contexte, la mobilité des compétences d’un secteur à l’autre comme leur « disposition » sur les territoires, devient à la fois un enjeu majeur et une question plus prégnante encore à analyser, évaluer et accompagner.

C’est pourquoi, l’émergence et le début de mise en réseau des « tiers lieux » (4) nous intéressent tout autant que les « entreprises apprenantes », le développement des CFA d’entreprises et de la FEST ou les reconversions en proximité initiées et gérées par des Groupements d’Employeurs (notamment pendant la crise sanitaire) ont pu nous intéresser et continuent de nous mobiliser.

C’est pour prendre toutes ces questions de « mobilités » au sérieux et nous efforcer de leur donner du sens (avec les acteurs et chercheurs concernés) que nous allons dédier nos activités des mois à venir et que nous vous invitons, partenaires actuels et à venir, à vous investir à nos côtés. Ensemble « il faut penser ce qui arrive – nous sommes les producteurs de l’avenir » (5) ou plus simplement, sachons devenir des « capteurs d’avenir » !

Jacques FAUBERT
Président de
L’Association pour l’accompagnement
et le développement des compétences

 

(1) Cf; les travaux du sociologue et philosophe allemand Harmut Rosa ou ceux, plus anciens, du sociologue et urbaniste Paul Virilo ou encore, ceux plus récents de géographes de la Revue « Territoires en mouvement »

(2) Cf. sur ce BLOG la contribution d’Hubert Grandjean : « En quoi le management des compétences est-il un levier de performance des organisations ? »

(3) Georges Perec dans « Espèce d’Espace » (1974)

(4) Voir le rapport « Nos territoires en action : dans les tiers lieux se fabrique notre avenir » (France Tiers Lieux 2021) coordonné par Patrick Levy-Waitz (https://francetierslieux.fr/rapport-tiers-lieux-2021)

(5) Paul Virilo « Vitesse et politique » (1977)

Université de Printemps 2021

Le programme de notre Université de Printemps 2021, qui s’est déroulé le 16 juin dernier, est encore disponible ci-dessous en format « diaporama ». Ce dernier s’active au passage de la souris sur la première vignette, en cliquant sur les flèches droite/gauche.

Vous trouverez ci-dessous des échos de cet événement.

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Du nouveau pour les transitions collectives

Le dispositif (que nous vous avons présenté sur ce BLOG) évolue, se développe et se renforce. Une instruction ministérielle du 11 janvier 2021 définit mieux le rôle des différents acteurs et insiste sur la dynamique partenariale, territorialisée, à construire (et pour partie déjà en construction sur une centaine de territoires dont la moitié à forts enjeux industriels). Saluons le beau travail de présentation et explicitation réalisé par Centre INFFO (dont on retrouvera un schéma synthétique, paru sur les réseaux sociaux, en lien ici). Et, de son côté, le Ministère du Travail de vient de faire paraître deux documents qui complète bien l’« outillage » des Transitions Collectives : un Questions-Réponses (à jour en date d’avril 2021) téléchargeable et une précieuse Fiche à destination des employeurs également disponible ici.

De premiers jalons vers une nouvelle réforme ?

A l’occasion de l’anniversaire de la Loi DELORS de 1971 sur la Formation, Centre INFFO a ouvert une série d’entretiens par un panorama (confié à Philippe CEPEDE) que nous ne saurions trop vous recommander, et poursuivie notamment avec Carine SELLIER (Haut-commissaire aux compétences, depuis le retrait de Jean Marie MARX) et au moins deux partenaires sociaux qui comptent : Geoffroy ROUX DE BEZIEUX (pour le MEDEF) et Yvan RICORDEAU (pour la CFDT). Compte tenu de l’ouverture d’un nouveau cycle de dialogue social sur d’éventuelles « retouches » à apporter à la Loi de 2018 sur la Formation Professionnelle que vient d’annoncer le Gouvernement, ces deux interventions croisées posent des jalons déjà importants, dont vous trouverez ci-dessous quelques points clefs à avoir en tête.

POUR LE MEDEF : il y a des améliorations à apporter, et le souhait de dégager des constats partageables à porter auprès du gouvernement. « Dans le viseur », il y a les limites du CPF : au-delà du nombre de comptes activés, il y a des interrogations sur l’utilité des formations activées, leur articulation avec le plan de formation des entreprises et plus généralement la co-construction avec l’entreprise. L’autre gros sujet pour le MEDEF, c’est la mise en œuvre du PIC (Plan d’Investissement dans les Compétences) qu’il résume de façon critique comme une façon de « faire payer les entreprises pour la formation des demandeurs d’emploi ». Enfin, le dispositif qui se met en place pour accompagner les reconversions professionnelles et les « transitions collectives » les interrogent du point de vue de sa complexité.

POUR LA CFDT : il y aura des avancées à défendre et développer, notamment « la dimension formatrice du travail et ses conséquences sur la certification » (de la VAE à l’AFEST, sans parler des pédagogies de l’alternance) et le principe du co-investissement ; et ne pas revenir sur le passage de l’obligation de payer à celle de former. Surtout, pour le syndicat, l’enjeu d’avenir c’est l’accompagnement, d’une part, en améliorant la portée et la capacité d’innovation sociale des outils en place (Entretien professionnel, CEP, Transitions collectives, …) en particulier au plan territorial, et, d’autre part, en en faisant une composante majeure d’une nécessaire transformation de l’offre de formation, dans laquelle le bénéficiaire dispose bénéficie d’un accompagnement tout au long de son parcours. Enfin, la CFDT plaide pour des politiques publiques et paritaires « plus efficientes » et donc moins segmentées et porteuses de plus de sens.